Le plus bel endroit pour attendre. Je ferme les yeux avec toi. Le monde est à tes pieds, celui de Dieu, celui des hommes. L’océan, la ligne d’horizon. Devant. Loin. Le ciel au-dessus, bleu, intense, sans un nuage. Là, devant, à tes pieds, le vert. L’herbe drue, conquérante qui s’imagine grande victorieuse de cette lutte incessante contre l’hiver. Car elle ignore que dans quelques jours elle disparaitra sous la fougère envahissante qui sera elle-même grillée par le soleil un peu plus tard.
Mais je vais trop vite. Revenons à nos moutons. Ils sont là, taches blanches mouvantes et carillonnantes sur les flancs de la colline. Parfois en carcasse, dévorés par les vautours qui là-haut, tournoient, seul, à deux, à trois, à dix, comme des pensées menaçantes dans un esprit trop serein.
Tu es là, debout, grand, dominant, au sommet d’une immensité verte. Entre l’horizon et toi, la montagne qui tombe, puis la plaine qui passe, sans qu’on s’en aperçoive, du vert, au rouge, puis au gris. Rouge des toits basques pimpants et chantants au gris des barres d’immeubles de la ville étourdie d’activité.
Ecoute, respire. Devant, la France. Derrière, l’Espagne. A gauche, l’océan. A droite, la montagne. En haut, le soleil. Au centre, Toi.
Ta peau qui chauffe. Les insectes qui s’apprêtent au festin, les pottoks qui épient tes mouvements, les vautours qui surveillent tes errances. Et moi, attentif à tes déplacements, qui guide tes pas dans le chemin caillouteux qui file tout le long de la crête. Ce chemin qui te fait encore aller plus haut. Tu sens la puissance en toi ? Rien ne peut t’atteindre ici. Chacun est à sa place.
S’il fallait mourir un jour, ce serait là.
Et nous serions alors recouverts de crottes de moutons, sucés par les moustiques, décortiqués par les vautours, envahis par les fougères, brulés par le soleil, éparpillés par le vent, nettoyés par les pluies torrentielles, croqués par les chiens des bergers.
Proposition : Choisir un lieu et partir en balade avec quelqu’un qui ne voit plus et lui faire découvrir.
Atelier d’écriture du samedi matin : Au fil des mots et des couleurs