A la brocante du coin de la rue

Démarrez une histoire à partir d’une situation observée dans une brocante et l’imprévu viendra influer sur le cours de votre histoire (tirage d’une situation nouvelle toutes les 5 mn)

– « Vous notez ma voiture ?
– Pardon ?
– Vous êtes en train de noter ma voiture ? »

Tiens, et si j’étais pervenche ? C’est la couleur de ma robe, son inquiétude, la vie trop lourde qui l’a blessée, trop souvent ?
Une vie à trimer, à ne s’asseoir jamais que sur des coins de table en formica jamais garnies que de casseroles émaillées remplies de ragouts répugnants
Une vie à rêver d’un quotidien plus beau, en bois poli et vaisselle de vermeil.

La nuit dernière elle a rêvé qu’elle se glissait dans sa BD préférée, en fait la seule qu’elle n’ait jamais vue dans le bouge qui a abrité son enfance : Tintin et la Castafiore. Quelle femme cette cantatrice. Et quel honneur de devenir sa gouvernante. Ah, si ça avait pu durer toute la vie. Mais ça n’était que le temps d’une nuit. Mais quelle nuit ! De soie, de velours, de pierreries, de cristal, de parfums. Quelles délicatesses, quels éclats, quelle voix !

Aïe, voilà, c’est la même chose tous les jours, et encore, et encore. Je viens de m’endormir sur ma chaise et plaf, je suis tombée. Trop belles nuits, toutes les nuits pour des réveils toujours plus raides dans ces foutus brocantes de macadam. Ça piétine, ça piétine. Ils n’ont que ça en tête, leur petite promenade pépère, mémère du week-end. Pas la peine de continuer à se pourrir la couenne à déménager des monceaux de vieilleries, la prochaine fois je leur vends le macadam. Bien vieux, bien usé. Et bouffis de nostalgie, tous ces parisiens blasés pourront dans leur salon faire les cents pas de la promenade du dimanche. Sans risque, ni virus, ni allergie.

Et voilà, je me suis débarrassée d’eux. Et je peux reprendre mes nuits sans être dérangée. Me rêver petite fille devant le tableau noir, en tablier gris, sagement installée devant mon pupitre à encrier, fascinée par les images pédagogiques Rossignol que mon maitre, si bienveillant, transforme en voyages merveilleux. Nous voilà partis sur un tapis volant à survoler le 15 : le plateau calcaire – le terrain granitique, une armée de fourmis en rangs serrés pour former des accidents dans le 29 – la vallée de la plaine, avant de se noyer dans le confluent.

Mais que se passe-t-il tout d’un coup ? J’ai froid, je suis trempée, il y a un bruit terrible autour de moi. Quelqu’un m’empoigne, me secoue, me donne des claques, me colle un masque sur le visage… J’ouvre les yeux, des lumières dans tous les sens, des portes qui claquent, je suis allongée, dans un camion, des visages sévères au-dessus de moi.

-« Mais voyons madame, que faisiez-vous allongée sur le trottoir avec un orage pareil ?
– Je rêvais, monsieur.
– Vous rêviez ? Ce n’est pas que ce n’est pas très bon, c’est très mauvais, ça, madame, de rêver ! »

Atelier d’écriture du samedi matin : Au fil des mots et des couleurs