Je suis puissance

Puissance du soleil qui met en lumière, sans distinction, blanc, noir, jaune, sans à priori de bien ou de mal, sans volonté de brûler ou de réchauffer, sans détermination d’éblouir ou d’éclairer. Une étoile dans l’univers présente pour faire vivre la terre.

Puissance de la montagne, née d’un frisson de la terre, polie par les siècles, habitée de toutes les bêtes, de toutes les plantes qui s’accommode de ses aspérités, saignée de tranchée d’accès à ses sommets, meurtrière dans ses sursauts de liberté.

Puissance du hérisson qui, sans façon, se lance au-devant de la mort sans trembler, inconscient du danger, fort de sa seule volonté ; cette fois encore il a traversé la route le hérisson.

Puissance du lendemain qui chante car il n’existe pas de jour si noir qui empêche le suivant de laisser venir la lumière.

Puissance de l’arbre tranché en deux par la foudre, tout à la fois pleurant la sève qui s’enfuit et fouillant au plus profond de ses racines l’énergie de sourire au printemps nouveau.

Puissance du béton coulé qui se laisse piétiner par des armées et qui, un soir de grand froid se fend, et laisse se déverser dans sa fracture le lac tout entier. 

Puissance de la première fleur du printemps qui pointe son nez sur le grand manteau blanc de la dernière neige mouillée. 

Puissance du sourire de l’enfant endormi qui fait exploser le cœur de sa maman. 

Puissance du torrent emportant dans son lit le tronc de l’arbre centenaire abattu par l’orage, puissance du torrent accueillant les pluies torrentielles de l’orage pour remplir son lit. 

Puissance du mot, le mot qui frappe, tape, sonne, résonne, engage et ne lâche rien, le mot qui en un instant te cloue ou te mets à genoux.

Puissance du regard croisé dans lequel tu t’es senti exister, bien malgré moi, bien malgré toi. Ce regard qui a changé ta vie. Il fait mal, désormais si loin, ce regard qui en un instant t’as rendu à ta vie.

Puissance de l’adolescent, saturé de conseils prudents, qui saute du haut du pont oubliant d’attacher l’élastique à sa cheville. 

Puissance du désespoir qui s’installe face à mon incapacité de faire face à tous les moments perdus, face à l’ignorance du plaisir partagé. Elle enfle, elle enfle, elle prend toute la place, bouche les issues, étouffe la gaité endormie, casse tous les ressorts de l’instinct de lumière.

Je suis puissance,
Puissance de la femme, de la confiance et de l’hésitation, puissance de la rigueur et de l’émotion, de l’énergie et de la douceur, puissance de l’alliance et de la persévérance, de la promesse et de la résilience, puissance de la responsabilité et de la joie.