Et si je me trompais, et si je prenais la mauvaise voie ?

Moi, tout au creux de toi,
je suis à peine là et déjà
je l’entends, je le sens,
on me le dira tant et de fois,
méfie-toi, méfie-toi
la vie sera plus dure que tu ne crois.

Maman te voilà penchée au-dessus de moi,
ton regard adorateur
plonge dans mes yeux émerveillés.
Mais déjà un voile embrume ta ferveur,
le doute te prend et te retient
de m’ouvrir confiante,
les voies de mon propre chemin.

Attention, attention,
les dangers rodent, ils sont partout,
dans la chute trop bête
si je me pose en casse-cou,
ou la dérive si facile,
si je me révèle trop fragile.

A chaque pas
je risque le faux pas.
Si dans la société je me coule
et rentre parfaitement dans le moule,
peu à peu, je pressens
que je plonge dans des sables mouvants,
sans même m’en apercevoir, en chantant,
je m’enfonce dans l’assoupissement.

Aïe, une ronce dans ma peau s’enfonce,
pas morte, je n’étais qu’assoupie
je m’aperçois qu’au nœud de moi se blottit une envie.
Sortir de la voie,
faire un vrai choix.
Aller chercher en moi
ce trouble qui chez toi,
Maman qui a tant veillé sur moi,
générait un tel effroi.
Aller toucher du bout de mes doigts
cette douceur de l’émoi
dont le temps a lentement couvert la voix.

Une peau puis une autre pour construire
un rempart après un autre qui lentement ont fait périr,
l’un après l’autre,
les apôtres
de l’instant sans demain,
de l’émotion sans condition,
du vivant sans compromission.

De petites morts en lâches abandons
me voilà couverte de tant de carapaces
que s’est évanouie la sagesse de l’audace.

Neuf mois sans plus de socialisation,
simplement moi face à moi,
soumise sans relâche à la question
me voilà à destination, seule devant moi.
Attention, attention, hurle-t-on derrière moi,
tout autour de moi,
à l’intérieur de moi.

Terreur d’un inconnu en gestation ?
Impatience d’allégresse en éclosion ?
Est arrivé le moment de ma floraison.
Glisser naturellement vers l’instinct,
le crayon à la main.
Confiante, me lancer dans le dessin,
de mon prochain destin.