Nos albums photo

Nous avons chacun dans nos armoires ou nos téléphones, des photos qui racontent nos vies. Et nous avons tous dans nos mémoires des instants immortalisés ou des rêves d’utopie qui n’existeront nulle part ailleurs. Ce sont ces instants et ces rêves que j’ai pris le temps de transformer en photographie que je vous propose de regarder avec moi. Si par miracle cette photo existe dans vos albums, je serais heureuse de l’admirer avec vous.

Cet homme, qui hante chacun de mes débuts de journée. Il est assis devant la boulangerie du bas de mon immeuble. Encore ivre de la veille, le visage hargneux, les jambes croutées, les ongles sales, les cheveux gris collants. Sans âge bien qu’avancé. Son gobelet posé devant lui, le trottoir mouillé par la pluie.

Les ailes déployées, un vautour plane dans l’immensité bleue. Impassible, attentif. Au-dessus d’une montagne ? D’une charogne ? Dans l’été brûlant ou l’hiver glacial ? Je me sens proie.

Un homme et une femme sont enlacés au milieu d’une foule sortant d’un théâtre parisien. La foules est souriante mais les visages de cette homme et de cette femme sont cachés, enfouis dans leurs manteaux d’hiver. Leur étreinte intense empli mon corps de leurs cœurs qui s’emballent.

Des fleurs partout dans ce carré cerclé de blanc. Polaroid. Des fleurs de toutes sortes, surtout des roses, de toutes les couleurs beaucoup de blanches, de toutes les compositions, coupées, en pot. Dans le coin à droite, un rectangle gris avec quelques lettres et des chiffres dessous : Lau 199

Le couvert est mis pour deux personnes. Rien ne manque, ni les serviettes, ni l’eau, ni le pain, ni le sel et le poivre. La disposition est impeccable, les couverts bien parallèles de chaque côté des assiettes. Entre les deux verres une jolie bougie allumée, sur l’une des assiettes un chevalet : Maman chérie, diner surprise ! Bisous

Elle est à l’entrée de sa chambre, éblouie par le flash. Elle fait la grimace. Elle serre dans ses bras un gros coussin bleu nuit sur lequel sont brodées trois notes de musique. Au coin de son œil brille une larme.

Ligne d’arrivée du marathon de Paris, un pied posé juste derrière, l’autre en l’air qui ira la dépasser, une belle jeune femme, un sourire resplendissant illuminant son visage, les traits tirés par l’effort, les bras levés au-dessus de sa tête racontant sa victoire. Est-ce son premier ? Sa joie éclatante me le donne à penser.

La Garonne qui s’écoule tranquillement. Au loin le pont Saint Pierre. La lumière dorée d’un matin de printemps joue avec le clapotis de l’eau. Un couple de dos marche en se tenant par la main. Leurs doigts sont mêlés, leurs pieds droits levés vers l’avant. A l’unisson d’une saison radieuse.

Happée par la joie dans son regard, je lui souris. Elle n’est pas figée, elle bouillonne de malice et d’indépendance. Son visage rond, ses joues rouges et rebondies, sa longue chevelure tressée, sa robe fleurie sur ses formes généreuses racontent une vie d’engagement et d’amour.

Au lin, la mer/ Devant la mer, une plage bondée. Devant la plage, un champ cerné de fil barbelé. Le champ est grillé par le soleil et recouvert de bouteilles en plastique. Au loin, sur la mer, un bateau de croisière avance suivi d’une trainée noire.

Au loin, la mer bleue turquoise. Devant la mer, une plage au sable blanc immaculé. Devant la plage, un champ vert rougi de coquelicots. Au milieu du champ, un buisson d’aubépine en fleur au pied duquel un enfant joue.

Ils sont cinq sur la plage, affairés autour d’une forteresse de sable. Tous à genoux sauf un, resté debout. Il domine. Sa silhouette a soigneusement été recouverte de feutre noir. Rodeur menaçant le fragile bonheur.

Une femme jeune, élancée, pas vraiment jolie mais dont le sourire révèle le grand cœur. Une main enserre sa taille. La personne qui se tenait à ses côtés a disparue. Découpée.

C’est juste un visage sur une profil Facebook. Il cherche l’objectif, tente un sourire. Sa bouche souffle sur la mèche qui menace de recouvrir son œil droit. Un bouton d’acné déforme l’aile gauche de son nez. La maladresse de l’adolescence incarnée dans l’aire d’un disque qui ne pardonne pas.

Fond lumineux. Deux jambes fines et légères, l’une le pied tendue vers le bord de l’affiche, l’autre repliée sous la première. Deux fesses calées sur un coussin rose à paillettes, le buste coupé sous la poitrine. Une femme sans doute heureuse avec sa paire de collants.

Une borne indique une frontière abolie. L’herbe rase et drue d’un vert intense tout autour. Au loin, la chaine des Pyrénées. Un groupe de randonneur assis en tailleur en cercle autour de la borne se tiennent pas la main. Un point comment les rassemble : leur unicité. Leur différence scelle leur union

Un fouillis de clés, de stylos, un peigne, du doliprane, des pastilles à la menthe une lime à ongle, un sachet de thé, un téléphone portable, un pass navigo, un rouge à lèvres, un passeport, une lanière en cuir. Dessous des cailloux et une barre noire métallique. Un sac à main répandu sur la voie du métro.

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